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Les morts chantent la Victoire !

11 novembre 1918, la guerre est terminée. Les poilus rentrent chez eux, les alliés regagnent leur pays. Les survivants de l'immense boucherie, de la guerre inutile, rentrent chez eux. Et beaucoup ont la "gueule cassée"...

La rumeur les accueille : Ces revenants ne sont-ils pas des planqués, des resquilleurs, des pleutres ?

Les vrais combattants, les vrais héros, les vrais Hommes, sont ceux qui sont morts.

Témoin cette citation d'un personnage des "Histoires déplaisantes" de Drieu la Rochelle. C'est une femme qui parle : "Ils m'ont aimée; mais ils ont été tués à la guerre. Maintenant, il n'y a que des pédérastes... des drogués, des eunuques !" C'est le discours de la dégénérescence, de la dévirilisation du peuple français, cher à la droite extrême. Les vrais hommes, les hommes virils, sont morts ! 1)

 

Certes, dans toutes les guerres il y a des planqués, des profiteurs, et même... des collabos ! Près de nous, j'ai été témoin des essais d'évitement du "départ en Algérie" au cours de cette guerre : j'étais, avant de partir moi aussi pour un an de l'autres côté de la Méditerranée, affecté à la direction des services de santé des armées et je voyais passer les demandes d'exemption pour des gens bien connus... Je me souviens en particulier des dossiers Jean-Philippe Smet, Sami Frey et autres que des gens haut placés voulaient protéger de la guerre  - même si elle ne disait pas son nom - mais tuait quand même. Ces démarches, autant que je m'en souvienne, n'étaient par reçues avec aménité par les gradés du service ! Mais la fin de la guerre en 1962 épargna aux futurs "planqués" le déshonneur...

 

Un mécanisme analogue eut lieu à la fin de la seconde guerre mondiale et de la victoire des alliés. Il s'agissait alors des prisonniers de guerre. J'en ai vécu une expérience familiale pénible. Mon père fut fait prisonnier au début de la guerre et fut libéré à la Libération. Un oncle avait subi le même sort mais il s'était évadé du camp où il était interné. Et bien entendu le héros était l'évadé, celui qui était resté interné était considéré comme peut-être un planqué, du moins un lâche, un résigné... Pas un homme viril c'est certain !

 

Revenons à 14-18. Ceux qui revinrent vivants durent ensuite compter avec la grippe dite espagnole, ramenée en fait des Etats Unis par les soldats américains. La grippe fit plus de morts que la grande guerre.

 

La morale de cette histoire, c'est qu'il vaut mieux être mort si l'on veut être un héros, en tous cas pas ne pas être prisonnier, mais éviter la grippe est encore préférable car ce n'est pas viril du tout !

 

1) In Olivia Gazalé, "Le mythe de la virilité". Robert Laffont, 2017

 



11/11/2018
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